Souvent associées à la production de sébum et aux problèmes de peau grasse, les glandes sébacées sont pourtant plus complexes qu’on ne le croit. Quelles sont leurs spécificités physiologiques ? Comment interagissent-elles avec la peau ? Explorons ensemble les différentes facettes des glandes sébacées.

Tout savoir sur la physiologie et la fonction des glandes sébacées.
- Que sont les glandes sébacées et où sont-elles localisées ?
- Comment fonctionnent les glandes sébacées ?
- Quels facteurs influencent l'activité des glandes sébacées ?
- Quels sont les rôles des glandes sébacées ?
- Quelles sont les conséquences d'un dysfonctionnement des glandes sébacées ?
- Sources
≈ 2 000 000
de glandes sébacées sur le corps.
400 à 900
glandes sébacées par cm² sur le visage.
Que sont les glandes sébacées et où sont-elles localisées ?
Les glandes sébacées sont des structures exocrines spécialisées de la peau.
Les glandes sébacées appartiennent à l’appareil pilo-sébacé, formant avec le follicule pileux et le muscle arrecteur du poil une unité fonctionnelle appelée l’unité pilosébacée. Elles se situent dans le derme profond et adoptent une forme lobulaire et regroupée autour d'un canal excréteur qui s'ouvre dans le follicule pileux. Ce canal permet au sébum synthétisé par les glandes sébacées à la base du poil de remonter facilement à la surface de la peau.

Remarque : Il existe aussi des glandes sébacées libres, qui ne sont pas associées à un poil, mais celles-ci sont minoritaires.
Les glandes sébacées sont constituées principalement de cellules sébacées spécialisées, issues de la prolifération des kératinocytes au niveau de la gaine externe du follicule pileux. Ces cellules, appelées sébocytes, passent par un processus de différenciation aboutissant à leur mort programmée. Durant cette maturation, elles synthétisent un mélange complexe de lipides qui sera ensuite libéré dans le canal excréteur : le sébum. Composé d’environ 50% de triglycérides, de 20% d'esters de cire, de 15% de squalène, ainsi que de petites quantités de cholestérol et de ses esters et de vitamine E, ce dernier possède des propriétés protectrices et hydratantes.
La densité et la taille des glandes sébacées varient significativement selon la localisation corporelle. On les trouve abondamment sur le visage, notamment sur le front, le nez et le menton, correspondant à la fameuse zone T, mais aussi sur le cuir chevelu, le torse et le dos, des zones réputées pour avoir une sécrétion sébacée importante. Les glandes sébacées sont en revanche absentes des paumes des mains et des plantes des pieds.

Comment fonctionnent les glandes sébacées ?
La production de sébum par les glandes sébacées repose sur un processus physiologique particulier, appelé sécrétion holocrine. Celui-ci se distingue par le fait que la libération du sébum ne se fait pas simplement par exocytose, mais par la destruction complète des cellules qui l’ont produit. En périphérie de la glande sébacée se trouvent des cellules sébacées immatures qui correspondent à des sébocytes non différenciés. Elles présentent une forme aplatie et sont en phase de prolifération active. Progressivement, ces cellules migrent vers le centre de la glande, entrant dans une phase de maturation. Durant cette étape, elles se gorgent de gouttelettes lipidiques issues de la synthèse intracellulaire de différents composés gras qui seront ensuite retrouvés dans le sébum.
Au fur et à mesure de cette migration interne, les sébocytes augmentent de volume et leur contenu lipidique devient de plus en plus dense. Lorsqu’ils atteignent la zone centrale, proche du canal excréteur, les sébocytes arrivent à la fin de leur cycle de vie : leur membrane cellulaire se fragilise, puis se rompt, libérant intégralement leur contenu lipidique. Une fois libéré, le sébum emprunte le canal pilo-sébacé pour atteindre la surface de la peau. Il se dépose alors à la fois sur la tige pilaire et sur la couche cornée où il se mélange aux lipides épidermiques et à la sueur. Ce mélange complexe formera ultérieurement le film hydrolipidique.
Ce mécanisme de renouvellement permanent permet aux glandes sébacées de produire en continu une barrière lipidique naturelle pour protéger et hydrater la peau.

Quels facteurs influencent l'activité des glandes sébacées ?
L’activité des glandes sébacées est régulée par un réseau complexe de signaux hormonaux, de facteurs de croissance et d’interactions neuropeptidiques. Les androgènes sont notamment au cœur de cette régulation, à commencer par la 5α-dihydrotestostérone (5α-DHT), produite grâce à l’action de l’isoenzyme 5α-réductase de type I à partir de la testostérone. Dotée d’une forte affinité pour le récepteur des androgènes situé au niveau des glandes sébacées, la 5α-DHT active ce récepteur et favorise la prolifération des sébocytes. À l’inverse, les œstrogènes exercent un effet inhibiteur sur l'activité des glandes sébacées et sur la synthèse de sébum, agissant comme un contrepoids aux effets androgéniques.
Parallèlement aux hormones sexuelles, certains facteurs de croissance influencent la physiologie sébacée. L’hormone de croissance GH et l’IGF-I (insulin-like growth factor-I) sont notamment impliqués, comme en témoigne l’augmentation de la sécrétion de sébum observée lors de l'adolescence, période où GH et IGF-I atteignent leurs concentrations plasmatiques maximales. L’IGF-I stimule directement la lipogenèse des sébocytes en activant le facteur de transcription SREBP-1, un régulateur des gènes impliqués dans la synthèse des acides gras. Cette activation passe par les voies de signalisation PI3K/Akt et MAPK/ERK. Des corrélations ont été établies entre les taux d’IGF-I et la sévérité de l’acné, ainsi qu’avec les niveaux plasmatiques de 5α-DHT et de DHEAS, soulignant l’interconnexion entre métabolisme lipidique, androgènes et signalisation par IGF-I.
Un autre acteur notable est le récepteur 2b du facteur de croissance des fibroblastes (FGFR-2b), dont l’expression est modulée par les androgènes et qui intervient dans la prolifération kératinocytaire. Dans certaines pathologies comme le nævus acnéiforme, une malformation caractérisée par une hyperplasie épidermique, des mutations activatrices de FGFR-2b conduisent à une hyperactivité sébacée et à une altération du follicule pilo-sébacé. Des modèles expérimentaux ont montré que la suppression postnatale de FGFR-2b entraîne une atrophie complète des glandes sébacées, confirmant son rôle structural.
La régulation des glandes sébacées ne se limite pas aux hormones et aux facteurs de croissance. Les microARN, de petites séquences non codantes d’environ 21 nucléotides, apportent un niveau supplémentaire de contrôle en modulant l’expression des gènes après transcription. Certains microARN, comme miR-574-3p ciblant le récepteur nucléaire RXRα, peuvent augmenter significativement la synthèse lipidique lorsqu’ils sont surexprimés. D’autres, impliqués dans des affections tumorales des glandes sébacées, influencent à la fois les voies NF-κB, PTEN et TGF-β, affectant ainsi la prolifération et la transformation cellulaire.
Enfin, même si la glande sébacée est richement vascularisée pour répondre à ses besoins élevés en nutriments et en précurseurs lipidiques, son innervation reste moins bien caractérisée. Des réseaux nerveux entourent le follicule pileux et passent à proximité immédiate de la glande, mais la pénétration directe de fibres nerveuses dans celle-ci est encore débattue. Cependant, la présence de récepteurs pour divers neuropeptides, tels que la CRH (corticotropin-releasing hormone), l’α-MSH ou encore le β-endorphine, suggère une sensibilité importante aux signaux neuroendocriniens. Par exemple, la CRH libérée de manière circadienne par l’hypothalamus module la sécrétion d’ACTH et de peptides dérivés de la POMC, qui peuvent influencer directement la prolifération et la différenciation des glandes sébacées.
La physiologie des glandes sébacées repose ainsi sur un équilibre dynamique entre signaux hormonaux, facteurs de croissance, régulation post-transcriptionnelle et réponses neuropeptidiques, chacun contribuant à ajuster la prolifération cellulaire et la production de sébum.
Quels sont les rôles des glandes sébacées ?
Si les glandes sébacées sont surtout connues pour leur capacité à produire du sébum, il ne s'agit pas de leur unique fonction.
Le sébum produit par les glandes sébacées a bien évidemment un rôle hydratant et protecteur, permettant de limiter l'évaporation de l'eau de la couche cornée, les frottements et la pénétration de micro-organismes pathogènes, d'allergènes et d'irritants, mais il permet aussi de transporter des antioxydants, comme la vitamine E, vers la surface cutanée, ce qui protège les lipides de la peau. Dans une certaine mesure, cela participe à la photoprotection naturelle de la peau. Par ailleurs, le sébum possède une activité antibactérienne grâce à certains acides gras libres qui perturbent la membrane des bactéries pathogènes. Il est donc essentiel à l'équilibre du microbiote cutané.
Les glandes sébacées interviennent aussi dans la modulation de l’inflammation cutanée. Elles produisent des molécules pro- et anti-inflammatoires selon le contexte, participant à la fois à la réponse immunitaire contre les agressions et au retour à l’homéostasie. Elles jouent également un rôle dans la neutralisation de certains xénobiotiques, des composés étrangers à l’organisme, en régulant leur métabolisme local. De plus, les glandes sébacées sont activement impliquées dans la cicatrisation : après une lésion, elles sécrètent des médiateurs lipidiques et des facteurs de croissance favorisant la reconstitution de l’épiderme.
Ce rôle multifonctionnel des glandes sébacées est étroitement lié à leur capacité à produire localement des hormones stéroïdes, notamment des androgènes. Elles possèdent toutes les enzymes nécessaires à la conversion du cholestérol en stéroïdes actifs, ainsi qu’à la transformation des précurseurs surrénaliens, comme le sulfate de déhydroépiandrostérone (DHEA-S), en DHEA, puis en androstènedione, en testostérone et finalement en dihydrotestostérone. Ce processus, catalysé notamment par la 5α-réductase de type I, est notamment actif dans les glandes sébacées du visage et du cuir chevelu. Cette production hormonale locale régule directement la différenciation sébocytaire et la quantité de sébum sécrété.
Enfin, les glandes sébacées interagissent étroitement avec le système nerveux cutané. Elles expriment des récepteurs au CRH, une molécule libérée en réponse au stress par les nerfs et certaines cellules de la peau. La CRH module la production de lipides par les sébocytes et influence l’expression d’enzymes impliquées dans la stéroïdogenèse. En parallèle, d’autres neuropeptides, comme la substance P, libérée par les fibres nerveuses périsudorales, peuvent stimuler les sébocytes périphériques, accentuant la sécrétion et l’inflammation locales. Ces interactions expliquent en partie pourquoi le stress psychologique peut exacerber certaines pathologies séborrhéiques, notamment l’acné.
Rôles des glandes sébacées | Explications |
---|---|
Production du sébum | Sécrétion d’un mélange de lipides assurant l'hydratation de la peau et sa protection face aux agressions extérieures |
Régulation de la stéroïdogenèse cutanée | Transformation locale du cholestérol en stéroïdes actifs grâce aux enzymes présentes dans les sébocytes, influençant l'équilibre de la peau |
Régulation de la synthèse locale des androgènes | Conversion des précurseurs surrénaliens en androgènes actifs, comme la testostérone et la dihydrotestostérone, essentiels à la maturation et à l’activité des glandes sébacées |
Interaction avec les neuropeptides | Réponse aux signaux nerveux via le système CRH/POMC, modulant la production lipidique et la réponse inflammatoire en fonction des stimuli de stress |
Synthèse de lipides à activité antimicrobienne | Production de certains acides gras et lipides spécifiques capables d’inhiber la croissance de micro-organismes pathogènes à la surface de la peau |
Propriétés pro- et anti-inflammatoires | Libération de médiateurs lipidiques et hormonaux pouvant activer ou freiner la réponse inflammatoire, jouant un rôle dans l’homéostasie cutanée et la cicatrisation |
Quelles sont les conséquences d'un dysfonctionnement des glandes sébacées ?
Le bon fonctionnement des glandes sébacées est essentiel à l’homéostasie de la peau. Lorsque leur activité est altérée, que ce soit par une surproduction, une production insuffisante ou une modification qualitative du sébum, l’équilibre du microbiote cutané, la fonction barrière et la régulation inflammatoire de la peau peuvent être compromis. Ces déséquilibres des glandes sébacées sont impliqués dans de nombreuses dermatoses inflammatoires, allant de l’acné à l’eczéma, en passant par la rosacée, le psoriasis et la dermatite séborrhéique.
Le lien entre les glandes sébacées et l'acné.
Touchant jusqu’à 85% des adolescents et pouvant persister à l’âge adulte, l'acné est la maladie de peau la plus répandue. Elle se caractérise par une hyperactivité des glandes sébacées stimulée par les androgènes à la puberté. Dans les lésions acnéiques, les glandes sébacées présentent une surexpression de l’enzyme 11β-hydroxystéroïde déshydrogénase de type I, qui augmente localement le cortisol et favorise la synthèse lipidique. Au-delà de la quantité, la composition du sébum peut aussi être altérée : diminution de l’acide linoléique, excès de squalène dont l’oxydation déclenche une inflammation et faible taux de vitamine E. On parle alors de dysséborrhée. Ces changements entretiennent la comédogenèse et l’inflammation cutanée. Les traitements qui réduisent l’activité des glandes sébacées, comme l’isotrétinoïne, confirment ce rôle : la baisse de la production de sébum s’accompagne d’une diminution des lésions, mais aussi d'une certaine sécheresse cutanée, toutes deux liées à la réduction de la fonction sébacée.
Le lien entre les glandes sébacées et l'eczéma.
L'eczéma se caractérise par une altération de la barrière cutanée, avec une augmentation du pH de la couche cornée et de la perte insensible en eau accrue et une diminution de l’hydratation. Si la majorité des études se concentrent sur le déficit en céramides d’origine kératinocytaire, l'altération de la fonction sébacée est elle aussi importante. Chez les patients atteints de dermatite atopique, la production de sébum est souvent réduite, ce qui contribue à la sécheresse cutanée et à la fragilisation du film hydrolipidique. Histologiquement, la peau lésée comme non lésée présente une hypoplasie sébacée, et, dans l’eczéma infantile, les glandes sont peu développées, avec des cellules basales de petite taille, dépourvues de lipides et sans activité sécrétoire. La sécrétion sébacée augmentant ensuite pendant l'adolescence, cela explique pourquoi de nombreux enfants sortent de la dermatite atopique à mesure que l’activité sébacée se normalise.
Le lien entre les glandes sébacées et le psoriasis.
Le psoriasis est une dermatose inflammatoire chronique touchant jusqu’à 8,5% des adultes. Bien que les modifications histologiques et immunologiques du psoriasis soient bien documentées, les altérations des glandes sébacées restent peu étudiées. Sur le cuir chevelu psoriasique, les lésions présentent souvent une atrophie marquée des glandes sébacées, avec une diminution de leur taille et de leur nombre, parfois complète dans plus de la moitié des cas. Cependant, la taille des glandes sébacées ne semble pas corrélée à la sévérité clinique ni aux signes inflammatoires, et la quantité moyenne de sébum dans la peau psoriasique est comparable à celle de la peau saine. Certaines hypothèses évoquent que des facteurs de croissance, comme le TGF-α et le facteur de croissance épidermique, surexprimés dans le psoriasis, pourraient inhiber les sébocytes, mais davantage de travaux à ce sujet sont nécessaires.
Le lien entre les glandes sébacées et la rosacée.
La rosacée est une maladie de peau chronique fréquente qui se manifeste principalement par des rougeurs diffuses. Chez les patients atteints de rosacée papulopustuleuse, la fonction barrière de la peau est altérée, avec un pH augmenté et une hydratation cutanée réduite. Cependant, la quantité totale de sébum et le taux d’excrétion sébacée au niveau du front ne diffèrent pas significativement de ceux des sujets sains, ni ne corrèlent avec la sévérité de la maladie. Néanmoins, la composition lipidique du sébum semble avoir une influence. En effet, les personnes atteintes de rosacée présentent généralement une augmentation des acides gras myristiques (C14:0) et une diminution des acides gras saturés à longue chaîne et très longue chaîne. Ce déséquilibre lipidique contribue probablement au dysfonctionnement de la barrière cutanée.
Le lien entre les glandes sébacées et la dermatite séborrhéique.
La dermatite séborrhéique est une dermatose inflammatoire qui touche préférentiellement les zones riches en glandes sébacées, telles que le cuir chevelu, le visage et le haut du tronc. Contrairement à ce que son nom suggère, cette affection n’est pas directement liée à une production excessive de sébum. Le rôle des glandes sébacées dans son développement est plutôt attribué au métabolisme des lipides du sébum par le champignon Malassezia, dont les lipases hydrolysent les triglycérides présents dans le sébum, diminuant leur concentration et augmentant celle des acides gras libres irritants. Cela provoque une perturbation de la barrière cutanée, une inflammation et une desquamation. La dermatite séborrhéique résulte donc d’une interaction entre les glandes sébacées, le microbiote fongique et la sensibilité individuelle, sans modification significative de la quantité totale de lipides.

Sources
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Thèse de Caroline TWAROG. Particules Janus pour des applications industrielles : Stabilités et incorporation de principes actifs (2017).
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Thèse de Lorrie RAMOS. Rôle de l'histone variante H2A.Z dans la prolifération et la différenciation des kératinocytes de la peau (2019).
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