L’utilisation de certains filtres solaires présente des risques pour l’organisme, comme pour l’environnement. L’octocrylène fait partie des filtres controversés. C'est pourquoi, chez Typology, nous avons décidé de ne pas en utiliser dans nos soins. Mais quels sont exactement les dangers associés à l'octocrylène ? Faisons le point ensemble.

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Pourquoi Typology n'utilise pas d’octocrylène ?
L’octocrylène, un filtre solaire qui fait débat.
Utilisé depuis les années 1990, l’octocrylène est un filtre UV organique qui agit principalement contre les rayons UVB (290–320 nm), tout en offrant une légère protection contre les UVA courts. On le retrouve aussi bien dans des crèmes solaires que dans des crèmes de jour ou des produits de maquillage contenant un FPS. Si l'on s'intéresse à sa structure chimique, l’octocrylène est un ester de l’acide benzoïque, caractérisé par une structure aromatique conjuguée. Cette configuration lui permet d’absorber les photons UV et de dissiper l’énergie sous forme de chaleur, un mécanisme classique des filtres solaires chimiques. Notons aussi qu'il s'agit d'un filtre lipophile, c'est-à-dire qu'il présente une bonne compatibilité avec les phases grasses.
Caractéristiques physico-chimiques | Valeurs |
---|---|
Formule chimique | C24H27NO2 |
Masse molaire | 361,5 g/mol |
Solubilité | Soluble dans les huiles, insoluble dans l'eau |
Aspect | Liquide visqueux jaune |
Côté réglementation, l’Union européenne autorise l’utilisation d’octocrylène à une concentration maximale de 10%, sauf pour les aérosols où il ne peut être incorporé à un pourcentage supérieur à 9%. Ce filtre figure donc à l’Annexe VI du Règlement (CE) n°1223/2009. Aux États-Unis, où la réglementation encadrant les filtres solaires est un peu particulière, l'octocrylène peut également être utilisé jusqu'à 10%. Il est néanmoins interdit en République de Palaos et sur les Îles Vierges des États-Unis, en raison des préoccupations environnementales qu'il suscite. Par ailleurs, l'octocrylène est suspecté de perturber le système endocrinien et fait aujourd'hui l’objet d’une surveillance accrue.
Par principe de précaution, nous avons décidé d'exclure l'octocrylène de nos produits solaires.
Est-ce que l'octocrylène est sûr ?
Même si l'octocrylène est un filtre solaire autorisé et réglementé dans l'Union européenne et aux États-Unis, cela ne signifie pas qu'il est totalement inoffensif.
Quels sont les dangers de l'octocrylène pour la peau et la santé humaine ?
L'octocrylène est associé à des risques de photoallergies.
L'octocrylène est généralement bien toléré par la peau. Une étude allemande conduite sur 2 577 patients soumis à un patch-test avec une solution d’octocrylène à 10% n’a révélé que deux réactions faiblement positives, soit un taux de seulement 0,08%. Ces résultats ont été confirmés à l’échelle européenne : une autre étude multicentrique a relevé un taux de réaction allergique de 0,7% chez plus de 1 000 patients suspectés de dermatite de contact liée à des produits solaires. Les enfants semblent toutefois légèrement plus sensibles que les adultes, probablement en raison de la fragilité de leur barrière cutanée et de la prévalence accrue de dermatite atopique dans cette tranche d’âge.
Les réactions de photoallergie sont quant à elles plus fréquentes. Dans une large étude européenne de photopatch-tests, environ 4% des personnes testées ont présenté une réaction photoallergique à l’octocrylène. Ce type de réaction semble fortement lié à une sensibilisation antérieure au kétoprofène topique, un anti-inflammatoire ayant une structure chimique proche. Dans une étude italienne portant sur 156 patients, 61,5% des cas de photoallergie à l’octocrylène étaient associés à une réaction concomitante au kétoprofène. Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer cette co-réactivité, dont une éventuelle dégradation de l’octocrylène en benzophénone, un composé photoréactif.

Une étude menée en 2021 a évalué la formation de benzophénone dans des produits solaires testés à l’achat puis après un vieillissement accéléré simulant un an de stockage. La benzophénone a été détectée dans tous les produits contenant initialement de l’octocrylène, mais pas dans celui qui en était dépourvu. Les taux moyens ont doublé après vieillissement (de 39 à 75 mg/kg), atteignant jusqu’à 435 mg/kg.
Les auteurs de l'étude ont ainsi conclu : "Nos travaux établissent sans ambiguïté que l’octocrylène subit une lente réaction de condensation rétro-aldolique qui donne naissance à la benzophénone. Ce processus s’est produit dans tous les écrans solaires commerciaux testés qui contiennent de l’octocrylène, entraînant une augmentation concomitante de la concentration en benzophénone lors du vieillissement du produit".
L'octocrylène est suspecté d'être un perturbateur endocrinien.
Des soupçons pèsent aussi sur l'octocrylène quant à son effet sur le système endocrinien. Certains travaux chez le rat ont montré que l’octocrylène peut affecter le métabolisme des hormones thyroïdiennes. Dans une étude menée en 2019, une exposition élevée (jusqu’à 193 mg/kg/jour) a induit une augmentation des enzymes responsables de la dégradation de la thyroxine (T4), entraînant une stimulation compensatoire de la thyroïde via l’axe hypothalamo-hypophyso-thyroïdien. Cependant, cette réaction est considérée comme spécifique aux rongeurs. Les humains possèdent une protéine de liaison à la T4 dans le sang, qui limite la déplétion de cette hormone et réduit donc le risque d’une stimulation thyroïdienne comparable. Pour cette raison, le Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs (SCCS) ne retient pas ces effets dans son évaluation des risques humains, même si la vigilance reste de mise.
Néanmoins, si l'octocrylène est accusé d'être perturbateur endocrinien, c'est aussi en raison de sa transformation en benzophénone. En effet, plusieurs travaux ont fait état d'une activité de type œstrogénique in vitro sur des cellules et in vivo sur des rats/poissons zèbres de la benzophénone. Cette dernière aurait un effet aigu sur les niveaux d'hormones reproductives endogènes chez l'Homme et interfèrerait avec le fonctionnement du système endocrinien (axe hypothalamo-hypophyso-gonadique), susceptibles donc d'affecter la santé humaine, après une application topique. Étant donné que l'octocrylène présente un fort risque de transformation en benzophénone, des inquiétudes subsistent.
L'octocrylène serait cancérogène.
Pour les mêmes raisons, c'est-à-dire en se dégradant en benzophénone, l'octocrylène présenterait un risque cancérogène. Un rapport de 2008 a révélé que l'exposition de cellules humaines de cancer du poumon à des concentrations non-toxiques de benzophénone pouvait conférer aux cellules un changement de comportement vers des phénotypes mésenchymateux (transition épithéliale-mésenchymateuse). Il s'agit d'un processus qui facilite la formation de métastases, soit la capacité des cellules tumorales résistantes à l'anoikis à migrer et à envahir les tissus environnants pour former des tumeurs secondaires. D'autres études auraient identifié des effets de ce composé sur la tumorigenèse mammaire chez des souris.
Toutefois, qu'il s'agisse de la benzophénone ou de l'octocrylène, davantage d'études sont nécessaires pour se prononcer. Par ailleurs, le CSSC a conclu dans son dernier rapport que l'octocrylène ne présente pas de risque cancérogène.
Existe-t-il des risques de l'octocrylène pour l'environnement ?
Enfin, au-delà des risques posés par l’octocrylène sur la santé humaine, ce filtre UV inquiète quant à son impact sur les écosystèmes aquatiques, en particulier les récifs coralliens. Des travaux menés sur le corail Pocillopora damicornis ont montré que l’exposition à des concentrations de 300 μg/L et plus entraînait une fermeture massive des coraux. Plus préoccupant encore, les chercheurs ont mis en évidence une accumulation d’octocrylène et de ses dérivés dans les tissus coralliens, dès 5 μg/L — des niveaux comparables à ceux mesurés dans certaines zones côtières. Ces dérivés, formés par couplage de l’octocrylène avec des acides gras, sont très lipophiles et susceptibles de s’accumuler durablement. Par ailleurs,, des traces d’octocrylène et de ses métabolites ont été détectées chez divers organismes marins, comme les dauphins et les moules, suggérant une bioaccumulation assez large.
Face à ces données, certains territoires, comme Hawaï, ont interdit la vente de produits contenant de l’octocrylène, afin de protéger les récifs de coraux.
Sources
Règlement (CE) n°1223/2009 du Parlement Européen et du Conseil.
HUNGERBÜHLER K. & al. Ultraviolet filter contact and photocontact allergy: consumer exposure and risk assessment for octocrylene from personal care products and sunscreens. British Journal of Dermatology (2014).
MARINOVICH M. & al. Review of the safety of octocrylene used as an ultraviolet filter in cosmetics. Journal of the European Academy of Dermatology & Venereology (2019).
LEBARON P. & al. Metabolomics Reveal That Octocrylene Accumulates in Pocillopora damicornis Tissues as Fatty Acid Conjugates and Triggers Coral Cell Mitochondrial Dysfunction. Analytical Chemistry (2019).
ADLER B. L. & al. Sunscreen Safety: a Review of Recent Studies on Humans and the Environment. Current Dermatology Reports (2020).
LEBARON P. & al. Benzophenone Accumulates over Time from the Degradation of Octocrylene in Commercial Sunscreen Products. Chemical Research in Toxicology (2021).
Scientific Committee on Consumer Safety (SCCS). Opinion on Octocrylene (2021).
KHALID M. & al. Environmental implications and nanotechnological advances in octocrylene-enriched sunscreen formulations: A comprehensive review. Chemosphere (2024).
FERNANDEZ-MARTIN M.-E. & al. Next Generation Risk Assessment to Address Disease-Related Vulnerability—A Proof of Concept for the Sunscreen Octocrylene. Toxics (2025).
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