L'altération de la barrière cutanée et de la fonction immunitaire.
Le vieillissement intrinsèque de la peau ne se limite pas à une diminution des fonctions métaboliques ou hormonales. Il s’accompagne aussi d’une désorganisation progressive de la barrière cutanée et d’une altération des mécanismes immunitaires qui en assurent la défense. Longtemps considérée comme une cible passive des médiateurs inflammatoires circulants, la peau est désormais reconnue comme un organe initiateur de l’inflammation. Les cellules de Langerhans, des sentinelles immunitaires, détectent les signaux de danger et activent les lymphocytes T, tandis que les kératinocytes eux-mêmes sécrètent des cytokines telles que l’IL-1, le TNF-α ou le GM-CSF.
Or, lorsque la barrière épidermique est perturbée, ces cytokines augmentent rapidement, entraînant une hyperplasie épidermique et une inflammation locale. Ce phénomène, bénéfique en cas d'agression ponctuelle, devient délétère lorsqu’il se répète avec le temps. L’activation continue des lymphocytes et la libération de médiateurs pro-inflammatoires entretiennent alors un cercle vicieux d’inflammation et de dégradation tissulaire, l'inflammation perturbant la différenciation des kératinocytes.
L'épuisement des cellules souches.
Le vieillissement cutané s’accompagne d’une diminution progressive du réservoir de cellules souches épidermiques et dermiques, pourtant essentielles au renouvellement de la peau. Elles assurent le remplacement continu des kératinocytes et la réparation des tissus après une agression. Avec l’âge, leur capacité de prolifération et de différenciation s’altère. Plusieurs mécanismes expliquent cet épuisement : l’accumulation de dommages à l’ADN, l’érosion des télomères et l’augmentation du stress oxydatif perturbent la stabilité génétique et métabolique de ces cellules. Parallèlement, la réduction des signaux de croissance, comme Wnt, et l’inflammation chronique altèrent la capacité des cellules souches à se réactiver lorsque la peau est lésée.
L'altération de la protéostase.
Le maintien de la protéostase, c’est-à-dire l’équilibre entre la synthèse, le repliement, la réparation et la dégradation des protéines, est très important pour la santé cellulaire. Dans la peau jeune, un réseau complexe de protéines chaperonnes, de protéasomes et de systèmes autophagiques assure la surveillance continue des protéines endommagées ou mal repliées. Cependant, avec l’âge, cette organisation se dérègle, notamment sous l'effet du stress oxydatif, ce qui entraîne une accumulation de protéines oxydées ou dénaturées au sein des kératinocytes et des fibroblastes. Cela déclenche une réponse inflammatoire de bas grade et un stress du réticulum endoplasmique, conduisant à une apoptose accrue et à une baisse de la viabilité cellulaire. À terme, la peau perd sa souplesse, sa densité et sa capacité de régénération.
Le vieillissement intrinsèque de la peau résulte d’un ensemble de processus biologiques interconnectés : augmentation du stress oxydatif, altération hormonale, affaiblissement immunitaire, épuisement cellulaire et déséquilibre de la protéostase. Ces mécanismes agissent lentement mais inévitablement, compromettant la capacité de la peau à se régénérer et à maintenir son intégrité structurelle.