Loin d’être un simple solvant, l’eau constitue environ 70% du volume des cellules de la peau et est le principal composant du cytoplasme, ce gel intracellulaire dans lequel baignent les organites. Elle est indispensable au métabolisme cellulaire et assure la fluidité des membranes, la diffusion des ions, la mobilité des vésicules et la bonne organisation du cytosquelette. Sans un niveau adéquat d’hydratation intracellulaire, l’activité des cellules de la peau est compromise, mais aussi celle des enzymes, ces protéines qui régulent une grande partie des processus biologiques. Par exemple, dans l'épiderme, la desquamation est orchestrée par certaines protéases, telles que les kallikréines, qui dégradent les cornéodesmosomes unissant les cornéocytes. Ces enzymes sont très sensibles à l’humidité ambiante : une baisse du taux d’eau dans la couche cornée inhibe leur activité, ralentit le renouvellement cellulaire et favorise l’accumulation de cellules mortes en surface. En conséquence, le teint devient terne et des squames peuvent apparaître.
L’eau permet également la propagation de signaux chimiques entre les cellules. En effet, de nombreux messagers solubles, comme les cytokines, les interleukines et les facteurs de croissance, diffusent dans un environnement aqueux pour activer les récepteurs membranaires. Si l'eau venait à manquer dans le milieu extracellulaire, la signalisation intercellulaire serait en partie entravée, ce qui pourrait affecter la réponse immunitaire. Notons aussi que plusieurs travaux ont montré que la déshydratation favorise le maintien d'un état d'inflammation chronique dans la peau.
Par ailleurs, l'eau est un acteur clé de la cicatrisation de la peau. Cette dernière repose sur une succession d'étapes : réponse vasculaire (hémostase), réaction inflammatoire, formation du tissu de granulation puis remodelage de la peau. L'eau est essentielle à chaque moment. En effet, dans un milieu suffisamment hydraté, les fibroblastes migrent plus rapidement vers la zone lésée, stimulent la synthèse de collagène et favorisent l’angiogenèse. De même, les kératinocytes se divisent et migrent plus efficacement sur un lit humide, ce qui accélère la reformation de l’épiderme. C’est pourquoi il est recommandé de bien hydrater une peau lésée et que les pansements hydrocolloïdes sont aujourd'hui privilégiés. Ces derniers permettent de former un gel à la surface de la peau et de créer un milieu humide autour de la plaie, c'est-à-dire un environnement propice à une cicatrisation rapide.
Enfin, l’eau joue un rôle majeur dans le processus de thermorégulation, principalement via la sudation. Pour rappel, la sueur est un liquide majoritairement aqueux produit par les glandes sudoripares qui se trouvent dans le derme. Lorsque l'organisme a chaud et que sa température s'élève au-delà de 37°C, les glandes sudoripares produisent de la sueur qui s'évapore à la surface de la peau au cours d'un processus qui consomme de la chaleur et permet de redescendre la température corporelle. La thermorégulation est une fonction vitale qui repose sur la disponibilité d'un stock d'eau mobilisable.