Très présent dans les produits cosmétiques et même dans certaines injections, l’acide hyaluronique soulève parfois des questions de sécurité. Cet actif est-il lié à un risque de cancer ? Réponse dans cet article.

Est-ce que l'acide hyaluronique est cancérigène ?
- L'acide hyaluronique pose-t-il un risque carcinogène ?
- L'acide hyaluronique comme traitement à certains cancers ?
- Sources
L'acide hyaluronique pose-t-il un risque carcinogène ?
En application topique, l'acide hyaluronique et ses dérivés ne sont pas considérés comme cancérigènes et le groupe d'experts du CIR (Cosmetic Ingredient Review) a conclu à leur innocuité.
Par ailleurs, à ce jour, il n'existe aucune étude de cancérogénicité dans la littérature scientifique liée à l'utilisation cosmétique d'acide hyaluronique. Toutefois, en injection, l'acide hyaluronique peut se retrouver dans la circulation sanguine. Il est alors important de préciser que certaines études menées par une équipe de biologistes et de cancérologues de l’Université du Michigan ont démontré une dépendance de la physiologie des tumeurs pancréatiques à l’acide hyaluronique. En effet, ces tumeurs se nourrissent entre autres d'acide hyaluronique pour se développer. Les chercheurs ont mis en avant qu’au fur et à mesure que se forme la tumeur, de l’acide hyaluronique est libéré en abondance par les cellules environnantes. L'acide hyaluronique est en fait à la fois un facteur de densité tumorale et un nouveau nutriment pour ces cellules cancéreuses du pancréas. L'acide hyaluronique étant une cible thérapeutique pour lutter contre ce cancer, les essais cliniques menés jusqu'alors tentent de dégrader ce sucre mais sans succès pour l'instant. Bien qu'aucune étude n'ait montré que l'acide hyaluronique injecté pouvait contribuer à ce type de cancer, la prudence est de mise.
Il est également intéressant de noter que des travaux scientifiques ont montré que l'acide hyaluronique présent dans les tissus, selon son poids moléculaire, exerce des activités biologiques distinctes et est capable de freiner l'évolution tumorale ou de la favoriser.

L'acide hyaluronique de haut poids moléculaire (HMW-HA) est considéré comme une forme protectrice. Il stabilise la matrice extracellulaire, limite l’inflammation et freine la prolifération cellulaire. In vivo, l'acide hyaluronique de haut poids moléculaire a montré sa capacité à inhiber l’infiltration de cellules immunitaires pro-inflammatoires dans des modèles de lésion pulmonaire, mais aussi à restreindre la migration et la régénération de cellules tumorales. Cette action bénéfique du HMW-HA repose sur son interaction avec le récepteur CD44. Lorsqu'il se lie à ce dernier, le HMW-HA empêche l’activation de Rac1 et la signalisation cycline D1-dépendante, ce qui bloque la prolifération tumorale. Par ailleurs, ce polymère réduit la production de COX-2 et de MMPs, des enzymes pro-inflammatoires souvent suractivées dans les cancers. Le HMW-HA agit aussi comme un piégeur de radicaux libres, protégeant ainsi les fibroblastes des effets oxydatifs pro-carcinogènes.
Il en va différemment pour l'acide hyaluronique de bas poids moléculaire (LMW-HA). Cette forme pro-inflammatoire active les récepteurs Toll-like (TLR), notamment TLR4, présents sur les cellules cancéreuses ou immunitaires. Le LMW-HA stimule ainsi la prolifération, l’invasion et la migration des cellules tumorales. Par ailleurs, les fragments courts d'acide hyaluronique stimulent l'angiogenèse, c'est-à-dire la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, nécessaires à la croissance tumorale. Il a aussi été montré que l'acide hyaluronique de bas poids moléculaire contribue à la perte d’intégrité des jonctions serrées dans l’endothélium lymphatique, ouvrant la voie à une dissémination rapide des cellules cancéreuses. Ce phénomène accélère les métastases et participe à l’apparition d’une résistance aux traitements anticancéreux.
Les différents mécanismes évoqués ci-dessus concernent l'acide hyaluronique naturellement présent dans les tissus humains. Aucune étude clinique n'a montré que l'acide hyaluronique que l'on applique sur notre peau a ce type d'effets.
L'acide hyaluronique comme traitement à certains cancers ?
Alors même que certaines sources considèrent l'acide hyaluronique comme potentiellement carcinogène, d'autres révèlent qu'il pourrait devenir un vecteur thérapeutique de choix pour améliorer la délivrance ciblée de médicaments anticancéreux. En effet, comme évoqué plus haut, dans les tissus normaux, les récepteurs à l'acide hyaluronique, comme CD44 ou RHAMM, sont exprimés à des niveaux faibles et nécessitent souvent une activation préalable pour interagir avec l'acide hyaluronique. À l’inverse, dans les tissus tumoraux, ces récepteurs sont surexprimés, en particulier CD44. Cela facilite l’internalisation de l'acide hyaluronique par les cellules cancéreuses, sans phase d’activation préalable, ce qui permet à cet actif d’être utilisé comme vecteur pour transporter des molécules actives directement au sein des tumeurs.
Face à la toxicité non spécifique de la chimiothérapie traditionnelle, l’utilisation de l'acide hyaluronique comme système de délivrance médicamenteuse pourrait améliorer la spécificité et limiter les effets secondaires.
Acide hyaluronique et paclitaxel : Le paclitaxel est une molécule largement utilisée dans le traitement des cancers du sein, de l’ovaire ou du mélanome. Cet anticancéreux présente une faible solubilité dans l’eau et une toxicité non spécifique. Plusieurs études ont montré que sa conjugaison à l'acide hyaluronique améliore son efficacité et sa stabilité. Certains chercheurs ont même ajouté un marqueur fluorescent à des nanoparticules d'acide hyaluronique lié à du paclitaxel, permettant un suivi in vivo et confirmant une accumulation préférentielle dans les tissus tumoraux.
Acide hyaluronique et doxorubicine : La doxorubicine est un autre agent majeur en oncologie. Il est toutefois connu pour sa toxicité cumulative. Pour contourner cette limite, certains chercheurs ont conçu des conjugués acide hyaluronique - doxorubicine stables et capables de cibler les métastases. Ils ont ensuite montré que cette combinaison permettait de retarder la progression tumorale et de prolonger la survie animale, tout en réduisant la toxicité.
Acide hyaluronique et cisplatine : La cisplatine est une autre molécule de référence en chimiothérapie, mais son utilisation reste limitée par sa toxicité rénale et neurologique. Certains travaux ont montré que sa conjugaison avec l'acide hyaluronique permettait une meilleure distribution dans les ganglions lymphatiques et les tissus tumoraux. D'autres études ont utilisé cette combinaison comme traitement contre le carcinome épidermoïde de la tête et du cou chez des souris. Résultat : une efficacité antitumorale supérieure et une perte de poids moindre chez les animaux traités, sans signes de toxicité systémique.
Les recherches sur l’acide hyaluronique ouvrent la voie à des stratégies thérapeutiques plus ciblées et mieux tolérées pour le traitement du cancer. Les données précliniques suggèrent que conjuguer cet actif avec certains médicaments pourrait améliorer leur efficacité tout en limitant leur toxicité, mais des essais cliniques restent nécessaires pour le confirmer.
Sources
ANDERSEN F. A. & al. Final report of the safety assessment of hyaluronic acid, potassium hyaluronate, and sodium hyaluronate. International Journal of Toxicology, (2009).
KIM K. S. & al. Hyaluronic acid-based theranostic nanomedicines for targeted cancer therapy. Cancers (2020).
LYSSIOTIS C. A. & al. Hyaluronic acid fuels pancreatic cancer cell growth. Cancer Biology (2021).
The Expert Panel for Cosmetic Ingredient Safety members. Safety assessment of hyaluronates as used in cosmetics status. Cosmetic Ingredient Review (2022).
MICHALCZYK M. & al. Hyaluronic acid as a modern approach in anticancer therapy - Review. International Journal of Molecular Sciences (2022).
SRIVASTAVA A. & al. Hyaluronic acid: More than a carrier, having an overpowering extracellular and intracellular impact on cancer. Carbohydrate Polymers (2023).
SHARMA P. & al. Hyaluronic acid as a tumor progression agent and a potential chemotherapeutic biomolecule against cancer: A review on its dual role. International Journal of Biological Macromolecules (2024).
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